Nick Wheeldon

Sound of Violence - Waiting For The Piano To Fall, Review

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A peine un an après la sortie du splendide Gift, revoici donc Nick Wheeldon avec son troisième album, intitulé non sans humour Waiting For The Piano To Fall. Celui-ci avait placé la barre très haut avec son précédent disque, l'attente était donc forte pour voir si l'anglais exilé de longue date à Paris en avait encore sous le capot.

L'entrée en matière désarçonne un peu : Stamping On The Daffodils est en effet très lente, voire quasi monotone, et même si on retrouve la voix à la limite de se briser de Nick Wheeldon, ses guitares flottantes, et même un piano bastringue, on reste un peu sur sa faim avec ce titre. Heureusement, They're Not Selling Flowers Around Here Anymore (quels beaux titres quand même !) rassure tout le monde. Tout le talent de Nick Wheeldon resurgit d'un coup, et il faudra un jour que la science se penche sur son cas : tout a l'air de se casser la figure, les instruments semblent se vider, les musiciens être dans un état second... Oui, mais la mélodie est sublime et la voix toujours sur le fil de prend aux tripes. C'est simple, on dirait un morceau joué par les Grant Lee Buffalo qui auraient oublié de s'accorder et auraient un peu trop forcé sur certaines substances. Mine de rien, sous ses dehors bien roots, il y a quand même un sacré boulot derrière pour arriver à faire sonner l'ensemble d'une telle manière.

Isaak accélère le tempo, et là on pense à Bob Dylan himself. Groove fantastique, morceau imparable, une tuerie, une vraie. Routine Prisoner ralentit de nouveau le tempo, mais c'est tout aussi beau, avec une performance vocale et guitaristique (si si, écoutez ce solo) de Nick Wheeldon de premier ordre. Oh! Surprise déroute un peu à la première écoute, avec une construction alambiquée et un violon, lui aussi semblant malade, mixé très en avant. Mais le final fait décoller tout le morceau et disparaître les réserves qu'on pouvait avoir. Black Madonna faisait partie des titres dévoilés avant la parution de l'album, et il n'y a pas à mégoter, c'en est une des pièces maîtresses. Montée en puissance savamment dosée, paroles politisées et intelligentes, Nick Wheeldon la joue à l'ancienne en s'amusant avec la stéréo – piano à gauche, guitare à droite –, c'est tout simplement remarquable. Forcément, As You Stood Before The Mountain qui suit apparaît plus comme un morceau de simple transition tellement la « madone noire » tape haut.
On pense que Nick Wheeldon va marquer le pas sur la fin de l'album, et pourtant non, voici qu'il nous sort Weeping Willow, rencontre entre Eels et Paul McCartney. C'est pastoral, bondissant, et tout simplement magnifique. Là aussi, le contraste avec Waiting For The Piano To Fall fait un peu mal, car cette dernière chanson, bien que loin d'être mauvaise, sonne presque « normale » après une telle merveille. Thief et ses quatre-vingt-dix-huit secondes font office de pause sur laquelle prédomine un piano bastringue avant le final, le mélancolique No Spider, qui clôt en beauté cet album.

En ralentissant le tempo, en allant chercher des constructions originales, Nick Wheeldon a pris des risques, ce qui est tout-à-fait louable pour tout artiste qui se respecte, mais qui, en l'espèce, fait que Waiting For The Piano To Fall est seulement excellent là où Gift tangentait le chef d'œuvre. Mais tout de même, sortir deux albums de ce calibre en quatorze mois démontre l'énorme talent que possède Nick Wheeldon, l'homme qui arrive à enregistrer des morceaux splendides avec des guitares semblant avoir été accordées par un enfant de cinq ans.